Photo en noir et blanc d'un signe en haut d'un immeuble : "When will you return"
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Salariés « boomerang » : une solution à la pénurie de talents ?

Voilà quelques années déjà que le phénomène des salariés « boomerang » prend de l’ampleur et commence petit à petit à bouleverser les méthodes classiques de recrutement. Il représente aujourd’hui une solution concrète aux nombreuses problématiques RH que rencontrent les entreprises, mais aussi une solution pour les salariés qui souhaitent voir leurs carrières évoluer.

Qu’est-ce qu’un employé « boomerang » ? C’est un employé qui a décidé de revenir dans son ancienne entreprise après l’avoir quittée. Les raisons de son départ initial peuvent être multiples : projet personnel, meilleure opportunité, entrepreneuriat, etc. Mais le résultat reste le même : il finit par vouloir revenir. Là encore, les motivations de son retour sont diverses, mais elles peuvent se résumer facilement : il se sent bien dans cette entreprise et il sait qu’il peut faire avancer sa carrière.

Cette pratique est en parfaite adéquation avec les besoins et les attentes des nouvelles générations qui entrent dans le marché du travail. L’idée de rester dans une seule et même entreprise tout le long de sa carrière est devenue impossible, surtout pour les générations Y et Z (les individus nés entre 1980 et 2000). Aujourd’hui, on n’a plus peur de démissionner pour reprendre ses études, se reconvertir ou même tout simplement pour prendre du temps pour voyager ou construire une famille. Après avoir vécu cette nouvelle expérience et avoir relevé de nouveaux défis, ils sont finalement nombreux à souhaiter réintégrer une entreprise qu’ils connaissent déjà et qui correspond à leurs valeurs et à leurs attentes professionnelles.

Pendant très longtemps, la démission d’un collaborateur était vécue comme une trahison par l’entreprise. On forme un nouveau candidat et on le fait monter en compétences pour qu’il finisse par partir à la concurrence ? La pilule était difficile à avaler. Pourtant, pour que le phénomène de « boomerang » fonctionne, il est très important que les entreprises changent leur opinion vis-à-vis de la démission, qui est, finalement, une étape normale dans toute vie professionnelle. Rien ne sert donc de vouloir à tout prix retenir un employé qui souhaite partir. Mieux vaut cependant laisser la porte ouverte, car réintégrer un ancien salarié présente beaucoup d’avantages pour l’entreprise elle-même !

Quand un employé « boomerang » revient, il revient changé : il a satisfait son envie d’aller voir ailleurs, il a appris de nouvelles choses et il redouble de motivation pour revenir travailler dans l’entreprise qui lui manque. À l’inverse d’un nouveau collaborateur, il n’y a aucun doute sur la qualité de son travail et sur sa capacité à s’adapter aux codes et à la culture de l’entreprise. Il connaît déjà l’équipe (ou en tout cas une grande partie) et les attentes de l’entreprise, il aura donc besoin de moins de temps pour s’intégrer et se mettre tout de suite au travail et être productif. Un recrutement et une intégration facilités et accélérés représentent pour l’employeur un gain important de temps et d’argent.

De plus, ses expériences passées dans d’autres entreprises et à d’autres postes lui permettront d’apporter un regard neuf et ainsi proposer de nouvelles idées et être porteur d’évolution et de croissance. Le salarié « boomerang » fait très souvent preuve d’un engagement fort à son retour. Il sait que ses collaborateurs et que son employeur attendent beaucoup de lui, il doit donc donner le meilleur de lui-même et ne décevoir personne.

Enfin, un autre avantage majeur est l’effet que le retour de leur ancien collaborateur a sur le reste de l’équipe. Si certains nourrissent également l’envie d’aller voir si l’herbe est plus verte ailleurs, le salarié « boomerang » pourrait l’en dissuader : « Si lui est revenu, peut-être qu’il n’y a pas mieux ailleurs. »

Alors que la pénurie de talents ne cesse de croître, cette nouvelle tendance du recrutement « boomerang » pourrait devenir une solution pérenne pour y palier. La recherche du profil idéal mais rare sera simplifiée par ce process, même s’il demande un suivi régulier avec le salarié après son départ. Si sa démission se déroule dans un climat de tension et que l’entreprise ne fait pas l’effort de prendre de ses nouvelles, il ne pensera jamais à revenir.

En principe, l’idée séduit beaucoup les actifs, en particulier les jeunes. Selon une étude du Monde datant de 2018, près de la moitié des Français entre 25 et 35 ans se disent prêts à réintégrer une entreprise qu’ils ont quittée. Aux États-Unis, le phénomène est déjà bien ancré : les trois quarts des responsables RH sont ouverts à l’idée de réembaucher un ancien employé.

Cependant, cette pratique, pour être positive, doit être adoptée avec précaution. Certes, elle présente un certain nombre d’avantages, mais elle peut aussi présenter des inconvénients. En effet, il est parfois difficile pour les managers et les collaborateurs de refaire confiance et de se fier à un salarié qui est déjà parti une fois. Certains peuvent se montrer encore rancuniers de cette « abandon » et avoir du mal à collaborer avec cette personne. C’est pourquoi il est très important que le retour du salarié « boomerang » soit bien préparé et bien expliqué à l’ensemble de l’équipe afin d’installer un environnement agréable pour tout le monde.

La réintégration réussie de l’ancien collaborateur ne se fera que si ses attentes et ses ambitions sont prises en compte. Pourquoi souhaite-t-il revenir ? Qu’est-ce qui l’intéresse dans l’entreprise ? Qu’attend-il exactement à son retour ? Plus d’argent ? Plus de responsabilités ? Son plan de carrière doit être clair afin d’éviter un autre départ dans les mois qui suivent.

L’erreur serait de partir trop confiant, autant pour l’employeur que pour l’employé. Certes il connaît l’entreprise et a déjà fait ses preuves, mais il ne faut pas hésiter à challenger ses compétences. Le risque est que l’ancien employé s’attende à ce que rien n’est changé depuis son départ. Or, le contexte actuel du marché du travail pousse constamment les entreprises au changement : nouvelles méthodes de management, nouvelles organisations hiérarchiques, nouvelles équipes, nouvelles règles, nouveaux objectifs etc. Une entreprise peut être amenée à beaucoup changer même en 6 mois.

Ces changements doivent être abordés rapidement dans le process de recrutement, avant la finalisation de l’embauche pour qu’il n’y aient de mauvaises surprises pour personne. En parallèle, un employé « boomerang », fort de ses nouvelles expériences, désirant tout changer trop vite peut également avoir un effet négatif sur l’équipe et l’ensemble de l’organisation. Trop de bouleversements majeurs peuvent faire fuir d’autres collaborateurs et déséquilibrer totalement l’entreprise.

Pour conclure, bien que l’employé « boomerang » puisse s’avérer être un véritable moteur pour la croissance d’une entreprise, sa réintégration doit être soignée et bien réfléchie. On sait que le problème de pénurie de talents est bien parti pour durer encore quelques années, on a donc encore le temps de perfectionner cette pratique !

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