Une femme sur un ordinateur portable. On ne voit que ses yeux qui dépasse au-dessus de l'écran et on peut voir qu'elle a des stickers rigolos collés sur son ordinateur.
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La personnalité peut-elle influencer la performance ?

Avec la popularité grandissante des soft skills, la personnalité prend une place de plus en plus importante dans le recrutement. Aujourd’hui, plus de 7 recruteurs sur 10 utilisent des tests de personnalité pour évaluer leurs candidats. Beaucoup estiment la personnalité comme un indicateur de réussite, au même titre que l’expérience et les compétences techniques. Mais existe-t-il un lien tangible entre la personnalité et la performance au travail ?

La réponse courte et simple est oui. Malheureusement, les entreprises font beaucoup de maladresses dans l’évaluation de la personnalité, ce qui les empêche souvent de faire des recrutements pertinents. Les compétences humaines sont difficiles à évaluer et ne relèvent pas d’une science exacte.

La plus grosse erreur que font les entreprises est de penser qu’il existe une seule « bonne » combinaison de soft skills (une seule « bonne personnalité ») pour tous les postes et toutes les structures. Ainsi, la créativité et l’extraversion sont toujours valorisées, même lorsque les missions ne le justifient pas forcément.

La personnalité seule ne peut prédire la performance, mais il est vrai que certains traits de caractères spécifiques sont particulièrement propices à certaines situations professionnelles. De fait, c’est notre personnalité et notre expérience personnelle qui forment notre vision sur le monde qui nous entoure et sur les autres. Il est donc évident qu’elles ont leur importance dans notre évolution professionnelle.

En revanche, ces traits de caractère doivent être confrontés et évalués en fonction du poste et non en fonction d’idées préconçues. Les entreprises doivent donc apprendre à distinguer l’utile du désirable. Ainsi, même si une soft skill peut paraître intéressante, elle ne permettra pas forcément à un candidat de réussir en fonction du secteur et de son poste. Dans certains cas, certaines « qualités » peuvent même se révéler être contre-productives (certains postes très techniques ou administratifs pourraient souffrir d’un candidat trop créatif qui cherche constamment à réinventer la roue).

Les traits de personnalité doivent donc être « matchés » avec des situations de travail spécifiques où ils pourront être mis à profit correctement. Les soft skills doivent être considérés comme des atouts « cachés » qui ne peuvent réellement s’activer dans les bonnes conditions. Plus une personne sera en mesure d’activer ses atouts naturels dans son travail, plus elle sera performante. À l’inverse, si une personne doit souvent « adopter » un comportement spécifique qui n’est pas naturellement le sien, cela peut créer des frustrations et aboutir à de mauvaises performances.

C’est pourquoi le recrutement par la personnalité doit être soigné. Une mauvaise adéquation entre la personnalité du candidat et le poste peut mener à une insatisfaction autant pour l’entreprise que pour le candidat. Pour ce faire, il est nécessaire de faire la différence entre les « évidences », c’est-à-dire les traits qui expliquent réellement la performance et « l’expérience », qui, elle, représente les traits que l’on pense être prédicateurs de performance. Mais comment ?

Il va sans dire que c’est un exercice loin d’être facile et qui demande une véritable réflexion avant d’entamer le process de recrutement, car il doit instruire la rédaction de l’offre d’emploi. La première piste pertinente est d’évaluer les personnes qui occupent déjà le poste pour lequel on recrute. Quels soft skills/traits de personnalité possèdent ces individus ? Comment évaluez-vous leur performance ?

Il existe notamment la théorie des Big Five, qui a vu le jour dans les années 80 aux États-Unis et qui identifie cinq traits majeurs de la personnalité dans le cadre professionnel : l’ouverture à l’expérience, la conscienciosité (s’appliquer dans son travail), l’extraversion, l’agréabilité et le névrosisme (être particulièrement sujet au stress).

Ainsi, cette théorie avance que :

  • L’ouverture d’esprit et la « conscienciosité » sont des indicateurs de performance dans les domaines qui requièrent beaucoup d’autonomie.
  • La stabilité émotionnelle et l’extraversion sont des indicateurs de performance sur les métiers qui nécessitent de fortes compétences sociales.
  • L’agréabilité aura plutôt tendance à impacter négativement les performances dans un secteur compétitif (à l’inverse de l’extraversion). Par contre, c’est une qualité très utile pour travailler en relation avec des individus mécontents (le service client, par exemple).
  • Le névrosisme peut en revanche impacter négativement les performances et la réussite professionnelle en règle générale, peu importe le poste ou le secteur.

Les tests de personnalité qui existent aujourd’hui sur le marché présentent des limites majeures, qui peuvent empêcher d’évaluer correctement les données importantes : les candidats doivent s’auto-évaluer eux-mêmes pour répondre aux questions et il est facile d’anticiper ce que le recruteur veut entendre. Les biais cognitifs présentent un vrai danger sur ces exercices, même si les recruteurs peuvent mettre en place des stratégies pour limiter leur impact (poser plusieurs fois les mêmes questions pour s’assurer de la cohérence des réponses), mais le problème est que ces tests jugent la personnalité des individus dans leur ensemble et non dans des situations précises.

Ainsi, une personne sera appliquée ou extravertie dans certaines situations, mais pas dans d’autres. Un candidat se montrera forcément plus nerveux pendant le process de recrutement et pendant les tests, que dans son quotidien. Une personne peut également être facilement distraite et peu motivée sur un sujet qui ne l’intéresse pas et être ultra-performant sur un projet qui le passionne.

C’est pourquoi il est important d’évaluer ces traits de caractère dans le contexte du poste : ses missions et les aspects sociaux qui l’entourent (le management, l’équipe, etc.) C’est un travail à effectuer en groupe, justement pour éviter les biais cognitifs qui peuvent nous pousser à apprécier une qualité plutôt qu’une autre, sans lien avec le poste. Le groupe doit être divers, avec des individus qui occupent différentes fonctions et qui présentent différentes qualités.

Attention cependant, la personnalité ne peut pas être le seul critère déterminant de la performance : elle doit être étudiée en complément d’autres critères (l’expérience, les compétences techniques, etc.) Il est également important de prendre en compte un autre indicateur de performance : la volonté de l’individu à performer et à réussir! Il ne faut pas sous-estimer les candidats qui ont souvent conscience de leurs faiblesses et qui sont prêts à les surmonter.

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