Une lightbox sur une chaise où l'on voit écrit "Think outside the box"
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Les habitudes en entreprise : un frein à l’innovation ?

En 2018, une étude montrait que 96% des entreprises prévoyaient de réorganiser leur mode de fonctionnement d’ici 2021. À moins d’un an de l’échéance, les résultats sont peu concluants : 94% des dirigeants se disent non satisfaits des performances de leur entreprise en matière d’innovation et seulement 37% des initiatives de changement se sont transformées en succès.

Le constat est le même pour tous les secteurs d’activité : peu importe leurs efforts et leurs investissements , les entreprises peinent à tirer leur épingle du jeu et à devenir des vecteurs de l’innovation. Comment expliquer cela ?

Pour commencer, il faudrait d’abord apporter une définition concrète au terme d’« innovation ». Contrairement à ce que l’on peut penser, l’innovation n’est pas exclusivement réservée aux chercheurs et aux inventeurs. L’innovation c’est simplement « apporter quelque chose de différent, qui crée de la valeur ». On peut innover de plein de manières différentes : innover un process de recrutement, une approche client, une stratégie commerciale, etc. L’innovation englobe aussi bien les idées révolutionnaires que les changements à petite échelle qui rendent le quotidien plus facile !

Selon une étude publiée dans Harvard Business Review France, les entreprises les plus innovantes répondent toujours à certains critères :

  • Elles partent du principe qu’elles peuvent toujours faire mieux ;
  • Elles se focalisent sur ce que veulent les clients ;
  • Elles savent que l’expérimentation et l’échec sont fondamentaux au succès ;
  • Elles encouragent leurs collaborateurs à prendre des risques et à exprimer leurs opinions.

Un grand nombre d’experts arrivent donc à la même conclusion : le plus gros frein à l’innovation est l’incapacité des entreprises à changer leurs (mauvaises) habitudes. La plupart du temps, ça n’a rien à voir la stratégie et les moyens à disposition. Non, le problème est que les individus se montrent résistants au changement et refusent de diversifier leurs méthodes.

Lorsque vous demandez aux dirigeants les raisons qui les empêchent d’atteindre leurs objectifs, ils tendent à mentionner le manque de temps, le manque d’argent, le manque de compétence, la prise de risques, etc. Mais le vrai obstacle est en fait l’« inertie organisationnelle ». Vous pourriez donner à une équipe tout le temps et l’argent du monde, si ses méthodes ne sont pas efficaces et qu’elle s’obstine à faire la même chose, elle ne pourra pas faire de miracle.

Parlons à présent des habitudes, et comment elles naissent. Ce sont des mécanismes automatiques formés par notre cerveau pour les tâches répétitives, nous permettant d’accorder plus d’énergie aux tâches plus complexes. Plus de 40% de nos actions quotidiennes sont des habitudes. Il est très difficile de s’en défaire, et cela demande généralement de gros efforts pour casser ces automatismes et les remplacer par d’autres.

Dans une entreprise, c’est la même chose. Il faut tout d’abord identifier ces habitudes néfastes à la transformation et à l’innovation et comprendre leur origine. Un excellent exemple de mauvaise habitude en entreprise est la réunion inefficace.

La réunion est un sujet très à la mode depuis quelques années. Souvent beaucoup trop longue, incluant beaucoup trop de personnes, elle est plus connue pour faire perdre du temps à tout le monde que pour la prise de décisions concrètes et efficaces. Pourtant elle reste encore un pilier du quotidien dans de nombreuses entreprises. Pourquoi ? Parce que la réunion du lundi matin est devenue une habitude.

Une démarche innovatrice ne serait pas nécessairement de supprimer la réunion ; la première étape pourrait être de l’améliorer, de la rendre vraiment efficace et productive pour tous les participants.

C’est une étude réalisée par Google qui nous apporte une première piste d’amélioration : il a été prouvé que « la sécurité psychologique et le fait que chacun ait un même droit à la parole » sont des facteurs essentiels à la réussite de projets innovants et performants.

En effet, l’innovation passe par l’écoute et beaucoup de dirigeants font malheureusement la même erreur : ils ne prennent pas toujours le temps d’écouter les bonnes personnes. Ils auront donc tendance à privilégier l’opinion des employés avec de l’ancienneté, sans prendre en compte celle des nouveaux employés. Or, c’est bien eux qui ont la vision la plus « fraîche » : ils sont encore en phase d’observation, ils ont donc un regard nouveau à porter sur les process, les méthodes et l’organisation de l’entreprise dans son ensemble. Ils seront donc plus susceptibles d’avoir des suggestions intéressantes à apporter ! Mais, quand ce n’est pas leurs managers qui rejettent leurs idées, c’est eux qui n’osent pas s’exprimer, de peur de faire une mauvaise impression dans un environnement encore nouveau.

Mettre en place des réunions où chacun se sent en confiance pour s’exprimer et où chacun est encourager à prendre des risques et à prendre des positions « controversées » est déjà un grand pas vers la disruption et la transformation… et donc vers l’innovation.

Dans son livre Breaking Bad Habits, Freek Vermeulen, professeur de stratégie et d’entrepreneuriat à la London Business School, met en garde contre « l’escalade de l’engagement », c’est-à-dire l’habitude de se reposer sur une stratégie précise, car elle a fonctionné dans le passé. Il explique que cette façon peut rapidement nous enfermer dans un cercle vicieux, et qu’il est très important de se rappeler qu’une approche qui fut un jour bénéfique peut tout à fait devenir néfaste dans un contexte différent.

Plus que jamais aujourd’hui, l’identité d’une entreprise doit être liée à sa capacité d’adaptation et non à des pratiques précises. D’ailleurs, c’est le danger avec les mauvaises habitudes : elles sont difficiles à identifier, justement parce qu’elles ne sont pas les mêmes pour tout le monde. Une stratégie qui fonctionnera pour une entreprise donnée peut tout à fait se révéler catastrophique pour une autre. Cela peut aussi bien dépendre du pays, de l’époque, du secteur, ou simplement des entreprises mêmes.

C’est pourquoi il est important de faire sa propre analyse et se poser les bonnes questions : « Pourquoi est-ce nous faisons les choses de cette manière-là ? »

Si la réponse est « Parce qu’on a toujours fait comme ça… » alors il est grand temps de changer !

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